J'me fais traiter de pédale par la plus belle nana d'la terre. Longues jambes, tignasse blonde, une princesse à la Disney, qui aurait troqué son air de pucelle contre celui d'une chienne en résilles. Mais elle continue à hurler plutôt que de craquer devant un sourire en coin, j'me fais traiter de bon à rien, de connard de première, d'chien galeux qui devrait aller crever sous les ponts, tout est passé en revu, habillé pour l'hiver. Et la voilà qui s'excite contre une poubelle, qui la massacre à coup de pieds en s'étouffant limite. Bordel mais elle a un problème, cette nana est dingue et j'savais même pas ce que j'avais pu lui faire. Baiser sa mère, sa petite sœur, son frère à la limite voire le père histoire de faire le tour de la famille encore potable niveau âge et exercice un minimum physique. J'donne pas dans le crade en général, mais avec elle c'est à se demander. Et j'reste comme un con, les yeux grands ouverts, à la regarder sans arriver à trouver quelque chose à lui répondre. Va trouver un truc pour fiotte frustrée. Et oui car en plus : il suce des queues. Ce drame. Un exemple pour la nation, elle a raison, j'devrais aller chercher une corde et la passer autour de mon coup pour arrêter le massacre. Puis ce bruit de pied qui s'écrase sur la poubelle commence sérieusement à me prendre la tête. La nana tourne les yeux vers moi, ses dents de devant sorties, le sourire carnassier. C'est bon, elle me fait flipper, ça me coupe la possible trique à venir. Et les canines s'allongent, un putain de vampire venu me sucer toute mon énergie vitale à défaut d'autre chose. J'bad, j'dois être en plein trip c'est pas possible, elle s'met à me parler italien maintenant, à me gueuler des atrocités dans la langue du pape – comparaison douteuse vu c'que je comptais en faire de la demoiselle avant qu'elle change d'apparence -. Le dernier coup est redoutable, la poubelle éclate, et j'me casse la gueule vers l'arrière, j'me vautre dans un trou noir et ouvre les paupières, le front en sueur. Deux secondes histoire de comprendre ce qu'il venait de m'arriver et j'éclate de rire. Un ricanement à la limite de l'euphorie devant le ridicule de la scène : les insultes sont bien là, les coups aussi. Mais au lieu de la nana sexy dans une ruelle à la con, c'est mon salaud de patron qui massacre le plafond du dessous pour me dire de me lever.

Ce connard ne connait pas le dimanche. J'ai jamais été un grand fana de Dieu, son fiston et toute leur clic auréolée, mais 'le traînerais devant la cour de justine divine pour le punir : on travaille pas le dimanche. Quoi que ça, il semble l'avoir intégré, à m'regarder passer le ballet dans la salle principale du resto en fumant sa roulée, tasse de café à la main. J'arrête deux secondes de gratter la poussière, m'accrochant au manche du ballet pour relever les yeux vers lui, balançant mon regard de chiot battu, rué de coups, à moitié crevé sur les parvis et auquel tu peux pas résister. « Milo ? » Voix faiblarde qui va avec le reste, j'veux mon dimanche. J'vais me plaindre, vraiment, c'est pas normal, de l'exploitation, de l'esclavagisme, de la torture même : j'passe le ballet le matin du jour au seigneur. Milo me fait un moulinet de poignet, suivie d'un tut tut de désapprobation. Salaud, un jour, j'aurai ta peau. (…) J'traîne des pieds dans le corridor, balançant un léger sourire à la concierge, planquée derrière son journal. Main posée sur la rambarde, clope fumante entre les lèvres, j'trace dans les escaliers, prenant bien soin de faire un bouquant monstre histoire de réveiller le bâtiment. La concierge gueule, j'entends un truc qui se brise dans sa loge. Sûrement sa tasse de thé qu'elle a envoyé baladé en essayant de se lever. Alors j'accélère un peu, me rue sur la seule porte que j'connaisse dans l'établissement, en tambourinant dessus. « Babe ouvre, t'as la concierge qui tente de m'violer. J'te jure, je l'entends monter dans les escaliers, je flippe, bouge ton cul. » Et j'me marre, seul.